L’abeille et le pissenlit

by erwan

Au mois de mars, j’ai cuisiné de la gelée de pissenlits. C’est un délice au parfum de printemps.

Avant d’attaquer le nettoyage de la cour arrière du manoir, il y a plusieurs jours, j’ai voulu faire une deuxième série de pots pour en préparer un stock conséquent à l’approche de la saison. Alors, muni de ma paire de ciseaux, j’arpentais le parc et j’entamais le prélèvement souhaité de quelques centaines de fleurs, car un petit millier d’entre elles est nécessaire pour la confection d’une dizaine de pots. C’est beaucoup et j’ai bien conscience que je ne suis pas le seul à vouloir profiter de leur saveur. Les fleurs de pissenlits sont parmi les premières sources de pollen pour les insectes à la renaissance du printemps. Et ils en sont friands jusqu’au dernier. Par habitude, j’en coupe donc une sur deux, laissant l’autre aux abeilles et divers pollinisateurs. Une sorte de partage entre la nature et ma conscience.

Mais ce jour là, il me fallait chasser une abeille quasiment à chaque fleur. C’était un crève-cœur et je me sentais vraiment de trop. J’ai donc vite renoncé et laissé les milliers de pissenlits épanouis aux abeilles des alentours.

Quelques jours plus tard, alors que je me reposais assis sur une traverse de granit qui borde la terrasse, contemplant l’avancée de mon travail auprès des ruines (et me désolant de ce qu’il restait à faire), une abeille est venue se poser sur ma joue. Elle est restée là trois secondes, ou peut-être plus. Le temps suspendu. Puis est repartie. Comme le jour où j’ai tué un frelon asiatique prêt à dévorer une butineuse chargée de pollen devant la ruche alors habitée. Deux abeilles étaient venues sur mon visage, l’une juste sous l’œil et l’autre sur ma joue. Sans me piquer, comme pour me remercier.

J’ai donc pris ce nouveau geste de tendresse pour un remerciement et me suis promis de ne plus cueillir de pissenlit cette année. Tant pis pour le stock, on fera un plus gros effort sur la gelée de fleurs des sureaux qui commencent à blanchir leurs ombelles.

Si les papillons du parc sont d’accord.

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